Lutter contre la congestion routière de la Métropole Européenne de Lille

La congestion de la circulation routière dans la Métropole Européenne de Lille, comme dans d’autres agglomérations françaises et européennes d’ailleurs, est une double absurdité : d’une part écologique par la surémission de polluants atmosphériques, et d’autre part économique par la surconsommation de carburants et les pertes de temps occasionnées.

Il convient donc d’agir pour contribuer à retrouver mobilité et fluidité, gages d’efficacité et d’attractivité pour notre Métropole aux ambitions internationales, en mettant en œuvre deux principes d’action :

  • séparer les flux de desserte de la Métropole des flux de transit Nord-Sud (Anvers-Paris) et Ouest-Est (Dunkerque-Charleroi), en réalisant les contournements routiers nécessaires,
  • financer ces investissements par recours à la technique du péage en application du principe « utilisateur-payeur » et « pollueur-payeur ».

La proposition pourrait être la suivante :

  • négocier la mise en concession de l’itinéraire « Dunkerque-Lille-Valenciennes-Maubeuge-Belgique » avec mise à 2×3 voies et réalisation du contournement sud de Lille,
  • et rouvrir le dossier de la réalisation de l’autoroute « Amiens-Arras-Lille-Belgique » (A1 bis ou A24) maintes fois décidée et abandonnée pour la réaliser une bonne fois pour toute.

La mise en concession d’infrastructures appartenant à l’Etat n’a rien de novateur puisque c’est ainsi qu’a été réalisée la modernisation et la sécurisation de l’itinéraire Bordeaux-Bayonne (la RN10 devenue A10, à péage). De même, le contournement sud de Reims a-t-il été confié en réalisation et exploitation à la SANEF, et les projets envisagés à Strasbourg, Rouen, Bordeaux, ou Lyon… sont étudiés selon ce même principe de concession et de péage.

Il est à noter que la qualité du réseau autoroutier concédé est meilleure que celle constatée sur le réseau non concédé, l’Etat étant plus exigeant avec le concessionnaire s’agissant de l’entretien des chaussées, des aires de repos et de service, comme des programmes de modernisation et d’élargissement, et lui-même étant largement impécunieux. Encore faudrait-il ne pas transformer les sociétés concessionnaires en boucs émissaires, pour camoufler les échecs gouvernementaux en matière de taxation de la circulation des poids lourds, pesant ainsi sur la conclusion d’un contrat pluriannuel de 3,5 milliards d’euros de travaux autoroutiers attendus tant par les populations et les élus concernés que par les acteurs économiques porteurs d’emplois ! Sans compter l’atteinte à la confiance qu’on peut désormais apporter à la signature de l’Etat !

Les nouvelles autorités métropolitaines semblent plus ouvertes à une réflexion pragmatique en la matière, et la future grande région Nord-Pas de Calais-Picardie pourrait prendre à bras le corps le sujet majeur qu’est la mobilité des personnes et des marchandises dans l’espace régional ainsi créé « au cœur de l’Europe du Nord-Ouest ».

Enfin, le transport des personnes et le transport des marchandises dans l’espace métropolitain ne se traitent pas de façon identique : si la réalisation d’un réseau RER « ex-Bassin Minier-Métropole Européenne de Lille » peut effectivement faciliter le transport des personnes et engendrer un transfert des déplacements de la route vers le rail, il ne résout pas la question des flux de poids lourds traversant le cœur de la Métropole pour relier « Le Grand Paris » et « le Range de l’Europe du Nord » : les contournements sud et ouest de la Métropole sont les réponses les plus pertinentes à cette absurdité écolo-économique.

Les discours et les ambitions en matière de « transfert modal » se heurtent aux réalités du transport : la réalisation d’une infrastructure nouvelle engendre moins un transfert d’un mode de transport à un autre qu’elle ne permet des mobilités nouvelles : la ligne TGV entre Lyon et Marseille a eu peu d’impact sur le trafic routier dans la vallée du Rhône ; en revanche, elle a permis des échanges nouveaux entre ces deux métropoles, tandis que le dégagement de sillons sur les voies classiques n’a pas engendré un accroissement significatif du trafic de fret par le fer ! Des constats identiques peuvent être faits, s’agissant de l’autoroute du Nord et du TGV Nord.

N’espérons donc pas de la réalisation du canal Seine-Nord Europe qu’elle fasse substantiellement baisser le trafic poids lourds sur l’A1 et l’A2, mais elle permettra de nouveaux échanges par conteneurs entre la Région Ile de France et…les ports du « Range de l’Europe du Nord » (au grand dam des ports du Havre et de Rouen !). La réponse aux problèmes de la route, c’est la route !

Certes, il faudra une ferme volonté politique pour conduire de telles réalisations, dont on peut craindre qu’elles ne se heurtent à l’opposition virulente de « zadistes » de toutes espèces, qui, au mépris des décisions prises par des autorités démocratiquement élues, s’acharnent à imposer par la force aux majorités citoyennes leurs convictions d’autant plus violentes qu’elles sont minoritaires.

Il faudra donc, outre une négociation « Etat-Région-Métropole-Sociétés concessionnaires » pour mettre au point les modalités d’un contrat politiquement pérenne et juridiquement sûr, mener à bien, en parallèle, un vaste débat public permettant d’éclairer les citoyens sur les enjeux et les modalités de l’action, sans faux fuyant et sans démagogie.

Vaste programme !

Texte de Francis Babé